Il n'est pas une religion qui n'ait fait l'apologie de la pauvreté. Or, il semble bien qu'une petite confusion de sens entre pauvreté-souffrance et détachement matériel qui, lui, recentre l'être sur des intérêts moins superficiels et de fait plus transpersonnels, se soit infiltrée dans l'esprit des gens. Si nous considérons l'argent, la richesse, l'aisance, la prospérité, comme une énergie créatrice, la pauvreté, autrement dit le manque d'argent, la précarité, la pénurie, devient logiquement une énergie destructrice. Tout est dans la nuance, l'argent étant parfois associé à la volonté de puissance, dans ce cas, il se pervertit et devient argent-destruction entre les mains de certains individus. Inversement, la pauvreté peut conduire l'homme à se transcender dans quelques cas très spécifiques mais ceci reste très exceptionnel. Connaître une période pénurie extrême oblige à réviser des valeurs lorsque l'esprit est exagérément axé sur le matérialisme. Elle oblige du même coup à développer d'autres qualités, plus subtiles, que l'on ne pouvait pas développer quand on est préoccupé par l'avoir pour l'avoir. Pour celui qui ne se préoccupe jamais du matériel pour lui-même, qui néglige l'aspect sécurité que le matériel ou l'argent apporte, la période de pénurie extrême l'oblige à réviser ses valeurs et ses préoccupations, car il apprend avec ce coup du sort que le matériel est la base nécessaire au développement de soi en général. L'être est destiné à se réaliser sur tous les plans de vie, matériel, émotionnel, intellectuel, spirituel, et quand le matériel fait défaut, les autres plans dysfonctionnent. Cependant et en aucun cas, on ne peut encourager quelqu'un à se rendre miséreux, sur un coup de tête, pour qu'il apprenne soit à se détacher du matériel soit à le considérer davantage. On ne peut qu'encourager à prendre une distance avec la possession en général puisqu'au final personne ne possède rien et tout le monde doit posséder tout. Il y a bien une différence, et non des moindres, entre la pauvreté, synonyme de capacité de détachement de l'avoir et des possessions égoïstes, qui fait grandir et évoluer l'homme dans une autre splendeur, et la pauvreté-misère-difficultés-manques qui entraîne inévitablement la pauvreté mentale et misère morale pour cause de désarroi, sans compter l'usure du corps.
La pauvreté comme la richesse fait croître ou décroître, fait vivre ou tue, tout dépend de chacun et des circonstances. |
©Lewis W. Hine Photographs
Giacomo Ceruti dit Pitocchetto - 1698-1767
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