Le sacrifice est ordinairement compris comme l'acte qui favorise l'obtention d'un profit. On sacrifie une chose matérielle à laquelle on tient ou un être cher pour en recevoir un bien d'une valeur supérieure au bien sacrifié. La valeur étant estimée par celui qui fait le sacrifice ce qui revient à dire qu'il attribue à son voeu une empreinte matérialiste..... Reste à savoir si Dieu ou les dieux en demandent autant. Le mot "sacrifice" signifie "rendre sacré". Traditionnellement, on fait un sacrifice quand on a reçu quelque chose alors qu'on ne l'attendait pas, par exemple à la naissance d'un enfant, on sacrifie ses cheveux selon un temps et un rituel précis. Dans ce cas, c'est la preuve d'un détachement de son bien, d'une part de soi, pour l'offrir au Divin. Et cette part de soi est élevée de fait à la dimension divine. Sacrifiée et sacrée ! Il n'a jamais été question qu'il fallait attendre un retour. Inutile de faire les yeux doux à Dieu par des amputations à la Vie. Celle-ci est précieuse et doit être respectée, car elle est elle-même sacrée puisqu'elle est un don de Dieu. Certains hommes aveuglés par le pouvoir, le besoin de possession ont sali le sacrifice, n'hésitant pas à tuer au nom de celui-ci dans l'espoir de recevoir toujours plus les grâces divines pour eux-mêmes, généralement le pouvoir et l'argent, et non pour le collectif. Assez proche de nous dans le temps, nous avons une histoire très touchante de sacrifice humain. C'est le sacrifice d'une mère qui offrit son unique enfant pour sauver tout son peuple. En plein XVIIIe Siècle dans l'actuelle Côte d'Ivoire, où les déchirements entre tribus, lignées et grandes familles ne se comptaient plus, une jeune femme, la Princesse Pokou réunit autour d'elle quelques chefs et organisa une fuite pour la préservation de leur lignée. Entreprise périlleuse et dangereuse. Leurs ennemis les poursuivaient et une nature et une faune hostiles leur faisaient face. Après des semaines de combat sans merci contre la douleur, la maladie, les dangers, et l'usure des corps et des esprits, la Princesse Pokou et ses partisans furent bloqués dans leur marche par le fleuve Comoé en pleine phase de turbulences et d'agitation. Un sorcier fut consulté pour savoir ce qu'il fallait faire pour calmer le fleuve et passer. "Il s'apaisera lorsque nous lui aurons donné ce que nous avons de plus cher". Tous en seul geste se délestèrent de leur or, pierres et autres objets précieux. "Non !" intervint le sorcier. "Ce à quoi nous tenons le plus ce sont nos fils". Toutes les mères dissimulèrent leur fils dans leur pagne. Pokou, après un long temps de réflexion et de prières, comprit qu'il lui fallait sacrifier son propre fils et qu'elle ne pouvait en aucun cas le demander à une autre mère, c'était elle la reine. Elle prit alors son fils le remit au sorcier qui le précipita dans les flots malgré les pleurs de tout un peuple. La légende dit que le fleuve s'est aussitôt calmé, qu'un arbre de l'autre rive s'est ployé jusqu'à eux pour faire en pont. Une autre dit que des hippopotames se sont approchés, alignés de telle sorte que chaque membre de la tribu put marcher sur leur dos. Enfin la liberté ! Enfin une nouvelle vie et un nouveau nom pour son nouveau royaume "Ba ou li", "l'enfant mort". Et c'est ainsi que naquit l'ethnie Baoulé. -Cf: "Reines d'Afrique" de Sylvia Serbin - ed.Sépia - |
Sacrifice d'Isaac ©Le Caravage - 1601
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